Il fût un temps, pas si lointain, j'déambulais farouche sur le boulevard entre Belleville et le Père Lachaise. Dan rappliquait en jonglant avec ses balles multicolores, un parachute planqué dans les ratiches. L'hiver on faisait un bout de chemin ensemble, l'été on posait un cul contre les grilles à côté du kiosque à journaux. On causait l'œil brillant et la pupille en tête d'épingle. Je me demandais toujours dans quelle interstice buccal, dans quelle dent creuse il allait chercher la bombonne de paco.
Il fût un temps, des plus dégueulasses où l'alcool s'invitait au petit déjeuner, zubrowska ou rhum coca... Pour que cessent les tremblements et que le ventre se dénoue. Cité de l'avenir, le port du casque était obligatoire et je faisais du hanche à hanche avec une frangine qui appréciait le zinc au dessus de nos têtes et les vadrouilles sur la dalle. Cahin-caha, entre pas de loup et frôlement de chat, on zigzaguait comme pour une danse inédite. Des étincelles dans nos regards accrochés aux réverbères.
Il fût un temps, j'ai oublié son nom et je ne ramassais plus les miettes tombées sur le carrelage, le gras qui s'échappait du plastique du sac poubelle. Le moment doux avait pris des coups de latte aux commissures des lèvres. J'avais griffonné : Passés les jours et les nuits câlines, que reste t-il de notre fougue, des sourires complices sous la couette. Collés l'un à l'autre dessus dessous, du merveilleux sandwich du pique-nique, ne demeurent qu'un sac à vin, deux vieilles miches et des petits cornichons.
Une voix disait "il pleut sur mon cœur comme il pleut sur la ville..."
Il fût un temps qui laisse au vent le soin de tout balayer et les larmes connaissent le chemin des rides pour se perdre dans des vallées sèches sous le soleil qui parfume l'asphalte et donne une brillance à nos mirettes plissées.
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