Charlie Bauer a pris la tangente pour de bon le 7 août dernier. Le bonhomme nous laisse ses mots, les idées ne meurent pas...
"Qu'est-il de plus important, être ou avoir ? Chacun, de tout temps, essaie de concilier ces deux modes d'existence et de les conjuguer comme il peut.
Qui n'a jamais menti, volé, éprouvé quelque colère ou révolte, enfreint le code (qu'il soit de la route ou pénal) ou au moins rêvé, imaginé, désiré le faire ? Celui qui ne se reconnaîtrait pas dans ces ardeurs, ces passions, ces hauteurs et ces bassesses, ces raisons et ces torts serait un saint ou un fourbe, ce qui est d'égale valeur ; et ce récit, ces mots ne peuvent l'intéresser.
Je parle au genre humain et non au surnaturel. Ce genre qui fait les individus pétris de fautes, d'erreurs. De ces êtres si beaux et si vils dans leurs imperfections qu'ils traduisent la preuve de leur perfectibilité."
«Ceux qui nous paraissent grands le sont bien souvent parce que nous sommes à genoux »
Debout, hommes de la terre, devenez enfin ou encore ce que vous êtes: des hommes !
Essayons encore de nous parfaire homidiens entre nous, et non plus lupus de l’un à l’autre, comme il est dit et pratiqué dans cet espace planétaire pluriquotidien, où il est d’évidence que l’homme a autant de raisons d’être bon que son contraire, ne pratiquant souvent cette raison d’être qu’à contrario de l’Etre de raison qu’il conviendrait.
Pour évoquer la condition humaine autrement que par le truchement littérateur et même philosophique, pensez-vous que la sacro-sainte «Raison d’Etat» soit bien conforme à l’état de raison?
L’impérativité étant dans l’accusation et partant, dans la revendication :
J’accuse l’Etat, prétendu garant de l’état de droit, de faillir à ses devoirs –et les plus fondamentaux, même- quand ce ne serait que ceux instruits par la Déclaration des Droits de l’Homme, stipulant que nous sommes tous égaux devant la loi.
J’accuse cet état de fait dont la responsabilité revient à l’État.
J’accuse la politique étatique de n’être que ce qu’elle est, une oligarchie politicarde à des années-lumière du sens politis du terme grec et dont la pratique serait au service de la cité.
J’accuse le Nationalisme érigé en Front commun de pensées, de comportement, et qui prône dans ses flatulences et rôts ponctuels, l’exclusion, la discrimination, la manipulation, la domination, l’exploitation, l’effraction des consciences, l’infraction du droit social, économique, civil, pénal…
J’accuse cette même oligarchie de nous contraindre à la pensée unique et télécrate, par induction de planification culturelle, sociale, économique, historique.
J’accuse la perversion phallocrate qui, depuis des millénaires, nous oblige dans la pornographie dominante des rapports homme-femme.
J’accuse le poète qui prétend que la femme est l’avenir de l’homme alors que celui-ci ne conçoit que le seul rapport culaire avec la féminité de cet individu identifié au 3615 de tous les désirs fantasmatiques et cul-turels.
J’accuse la femme dans son rapport prostitutionnel à l’homme.
J’accuse la mondialisation qui va de l’Euro au Waterloo de toute intelligence sociale et humaine.
J’accuse ces manipulateurs intellocrates pontifiant par livre noir et bordant le lit de la Pensée Unique où se vautrent les certitudes conformes de la sénescente facilité.
J’accuse nos éducateurs d’être éducastreurs des forces vives de l’espoir et de sa pratique revendicatrice.
J’accuse ce Dieu d’être patron et patrie, et ses apôtres patriotes. J’accuse ses saints et patrons à ne pouvoir être ces seins nourriciers de la pensée humaine.
J’accuse le désespoir, s’il n’est autrement perçu que comme la forme supérieure de la critique et qu’il convient d’appeler bonheur.
J’accuse l’amour lorsqu’il est comptable d’une réciprocité, donc commercial.
J’accuse la haine si elle ne sait se concevoir de classe.
J’accuse ces pédophiles politicards de baiser et tuer l’enfance en chacun de nous.
J’accuse l’ignorance de se conforter dans la bonne conscience d’un Savoir, digéré par un pouvoir gargantuesque.
J’accuse les optimistes s’ils ne savent être pessimistes des réalités existantes.
J’accuse l’homme d’avoir fait du loup son chien et de l’homme son esclave.
J’accuse cette aristocratie promue en Cour boursière, d’être ce qu’elle n’est pas –aristocrate- et ce qu’elle est: assassine du genre humain.
J’accuse l’homme d’être prédateur de toutes les espèces, végétales et animales et de la sienne en particulier.
Je vous accuse en m’accusant d’être ce que nous sommes, mais critiques cependant, ce qui nous autorise à être différents.
En vous espérant bonne accusation de ce vrac accusateur. Charlie Bauer, sociologue.
Extraits de Rouge Bandit, portrait de Charlie Bauer réalisé par Fred K. Nicolas
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